Salut mes petits gastéropodes,
Voilà un bout de temps que le lundi-littéraire est reporté à maintes reprises, et ceci à contre-coeur, notamment dû au travail. La passion de l’écriture et du partage des livres s’en voit donc pâtir de ces priorités non négligeables (bien que mes articles soient préparés à l’avance). En plus de cela, quelques relectures et une prise de recul nous font constater que les écrits ne sont, au final, point terminés. Et en tant que grande amatrice de textes bien peaufinés, il m’est impossible de publier quelque chose d’inachevé.
Mais trêve de bavardage explicatif, et laissons-nous emporter par cette reprise du lundi-littéraire.
Et dans cette nuit blafarde à serpenter sur les moindres lumières téléphoniques, notre conscience se perd progressivement et se confond dans ce brouhaha sordide et réconfortant, entre distraction et abrutissement.
Le soleil se couchait à mesure que les doigts virevoltaient sur l’écran lumineux greffé sur ses mains. En un clignement d’yeux, le soir éclatait de sa noirceur. Il ôta ses yeux asséchés de son appareil pour constater la pièce déjà obscure. Un soupir triomphant sur cette accélération du temps plaisante dans l’oisiveté destructrice, il se leva avec peine de son fauteuil empreinté d’un fessier fossilisé et se dirigea vers la cuisine pour préparer quelques mets déjà pré-cuisinés dans l’unique but de répondre aux besoins de son corps.
Et c’est dans ce décor affligeant que nous porterons notre attention sur ce livre posé au chevet de cet humain en errance. Un livre illuminé par la seule ampoule grésillante de sa demeure, clignotant par intervalle régulier, comme un clin d'œil à son hôte pour le diriger sur sa couverture et l’inviter à feuilleter ses pages et ses pensées encrées sur ce papier de beige et de gris.
En 3 points → Philosophie, psychologie, transformation
LE CORPS DE L’OEUVRE
« Le jour où j’ai appris à vivre », c’est une histoire sur la vie, sur ces gens des grandes villes qui se perdent dans ce train-train quotidien rongeur et fantasmagorique, oubliant l’humanité qui habite leur coeur, oubliant de penser à l’Autre, à regarder l’Autre dans les yeux avec simplicité et sincérité.
L'histoire principale se déroule tranquillement dans une douceur âcre, avec un personnage assez banal au final, un monsieur-tout-le-monde aux rebonds tonitruants. En parallèle, d’autres histoires se déploient, plus secondaires, qui gravitent ici et là, sans toutefois se rencontrer pour autant, ce qui donne un aspect intéressant au niveau structural.
Une mini enquête s’élabore donc entre notre personnage et les secondaires, cherchant à comprendre, à éclaircir nos doutes et nos soupçons. Donnant ainsi aux détails un souffle palpitant qui nous donne encore plus envie d'avancer dans notre marathon livresque, essoufflé par cette lecture d’une nuit entière à être éveillé.
DES PRÉLIMINAIRES EN ÉMOIS
D'une manière assez générale, l'écriture ne m'a pas tant émue, mais la rencontre mérite le partage. Nous nous contenterons donc d'une sélection d'un apéritif d'extraits qui ne représentent pas nécessairement l'entièreté de cette œuvre.
Commençons avec ces légèretés familières qui nous font esquisser un sourire narquois et approbateur.
« L’intelligence émotionnelle… Qu’est-ce qu’on n’inventait pas pour rassurer les cons… Pourquoi pas l’intelligence musculaire, l’intelligence digestive, l’intelligence défécatrice ? » p.23
Et dans cet océan de mots, quelques phrases noyées dans les pages et les lettres impactent bien comme il faut, se faisant lire et relire inconsciemment dans cette brasse de réflexions.
« Avec la vitesse, on perd en émotion ce que l’on gagne en sensation.» p.67
« Plus tu courras après tes désirs, moins tu seras satisfait. » p.75
Terminons prestement avec mon gros coup de cœur sur cette scène d’un des personnages secondaires.
« Gary soupira. Non, il ne voulait pas. Alors il regarda le gars en face, et ne dit plus un mot. Il le fixa, juste comme ça, sans rien dire. Sa tactique préférée. Silence. Quand vous faites une objection, les mecs, ils ont réponse à tout, prévu d’avance, appris par cœur. Alors le mieux, c’est le silence. Pas d’aspérité pour se raccrocher. Quand y a pas de grumeaux, ça glisse.
Le gars toussota encore, puis regarda sa montre. » p.173
UN METS POUR QUELLE DILETTANTE
« Le jour où j’ai appris à vivre », ce sont ces livres que l’on catégorise dans la rubrique
« développement personnel », ce genre de lecture qui arrive dans ta vie sans même que tu t’y attendes. C’est ce fameux livre qui te choisit. Qu’il soit conseillé par un proche, vu et revu dans une bibliothèque ou découvert au détour d’une vidéo faisant sa promotion. Il s’agit plutôt de ces situations extérieures qui nous amènent à sa lecture.
Mais pour qui est donc cette lecture, me diriez-vous ? Je répondrai, majoritairement pour des adultes. Toutefois, je trouverai cela fort dommage et restrictif car oui, les adolescents ont le droit de s’y intéresser et de découvrir ces thématiques même s’ils ne sont pas concernés ou ne comprennent pas toute l’entièreté de son contenu. A l’instar du Petit Prince, il est des livres qui peuvent être lus à des âges différents et à chaque fois, se révèlent sous de nouvelles réflexions qui nous atteignent et nous parlent.
Et si nous devions être encore plus précis, cette lecture est faite pour ceux qui découvrent cet univers, ceux qui sont perdus dans un moment de leur vie et peuvent se reconnaître dans les personnages.
De mon point de vue, pour les personnes déjà sensibilisées ou ayant fait ce travail, cela peut être “ennuyeux” d’une certaine manière. La lecture devient plus un divertissement qu'un travail sur soi. Mais cela n’empêche pas que cela puisse faire quelques piqûres de rappel sur certaines choses oubliées, ou que certaines phrases puissent résonner fort dans notre esprit. Car tout n’est qu’apprentissage, rien n’est acquis et tout est en perpétuelle évolution.
GOUNELLE Laurent. Le jour où j’ai appris à vivre. Editions Kero, 2014
Comments